Premier anniversaire du nouveau dispositif d'encadrement des loyers (à nouveau) entré en vigueur en juillet 2019. À Paris, plus de la moitié des annonces dépasse les plafonds légaux.
Après son annulation par les tribunaux administratifs, l'encadrement des loyers a été rétabli par la loi Elan en novembre 2018 , «à titre expérimental» sur une période de cinq ans pour les zones concernées, avec une mise en œuvre au 1er juillet 2019.
Un arrêté préfectoral indique les loyers de référence par quartier, ainsi que les seuils, «minoré» pour le plancher et «majoré» pour le plafond, qui ne doivent pas être franchis.
Premières villes à appliquer l'encadrement dans sa version initiale, Paris et Lille ont aussi adopté la deuxième mouture, dès le 1er juillet 2019 dans la capitale et depuis le 1er mars 2020 dans la préfecture du Nord.
Les autres métropoles n'ont, pour le moment, pas choisi cette voie. L’encadrement est prévu seulement dans des zones où le marché locatif est très tendu, avec une demande de logements beaucoup plus importante que l'offre, pouvant conduire à des loyers excessifs.
Parmi les 28 plus grandes agglomérations françaises, 1.150 communes sont théoriquement éligibles à cette mesure.
1.500 euros par an
Un an après le retour de l'encadrement des loyers à Paris, la plateforme d'estimation immobilière en ligne Meilleurs Agents a analysé 5.500 annonces d'agences immobilières pour des locations non meublées afin de dresser un premier bilan et suivre l’évolution des loyers dans les arrondissements de la capitale.
Selon cette étude, plus d'une annonce sur deux (53%) ne respecte pas l'encadrement des loyers à Paris. Cette proportion augmente quand les logements sont situés dans les arrondissements les plus chers : dans le VIe (70%), le VIIe (60%) et Paris Centre, qui regroupe désormais les quatre premiers arrondissements (67%).
L'étude de Meilleurs Agents évalue le dépassement moyen à 130 euros par mois, ce qui représente un dépassement de 1.500 euros de loyer par an.
Paris 53% des annonces dépassent le plafond pour un montant moyen de 130 euros par mois
Arrondissement | Annonces dépassant le plafond légal (1) | Dépassement moyen par rapport au loyer de référence (2) |
Ier, IIe, IIIe, IVe | 67% | 155 euros (13%) |
Ve | 49% | 139 euros (12%) |
VIe | 71% | 160 euros (13%) |
VIIe | 60% | 160 euros (11%) |
VIIIe | 58% | 182 euros (13%) |
IXe | 60% | 144 euros (14%) |
Xe | 58% | 124 euros (16%) |
XIe | 59% | 134 euros (15%) |
XIIe | 40% | 108 euros (13%) |
XIIIe | 52% | 107 euros (11%) |
XIVe | 47% | 119 euros (11%) |
XVe | 42% | 109 euros (10%) |
XVIe | 55% | 152 euros (12%) |
XVIIe | 50% | 125 euros (12%) |
XVIIIe | 53% | 117 euros (13%) |
XIXe | 58% | 105 euros (13%) |
XXe | 52% | 100 euros (14%) |
Moyenne | 53% | 130 euros (13%) |
(1) Part des annonces dont le loyer affiché dépasse le loyer de référence. (2) Dépassement en euros et en pourcentage du montant. Loyer de référence majoré selon le quartier, le nombre de pièces et la date de construction du bâtiment pour des locations non meublées. Source: Meilleursagents, au 24 juin.
Petites surfaces pénalisées
La plateforme note aussi que plus la surface est petite, plus le respect du loyer de référence semble difficile. Sur l'échantillon d'annonces observées en juin, près de 80% des annonces dépassent le plafond autorisé parmi les appartements de moins de 20 mètres carrés.
«Ce sont malheureusement les loyers des petits logements qui, le plus souvent, ne respectent pas les plafonds légaux, alors que ce dispositif devait justement protéger les locataires de ce type de surface, comme les étudiants», remarque Thomas Lefebvre, directeur scientifique de Meilleurs Agents.
Les bailleurs ne sont pas forcément mal intentionnés. L’étude ne permet pas de déterminer si les propriétaires loueurs dépassent le plafond légal en appliquant un complément de loyer, autorisé lorsque le bien présente des caractéristiques exceptionnelles.
C'est toutefois une situation rare, les critères étant assez restrictifs (terrasse, vue, etc.). Mais ce pourrait être une forme d'abus déguisé, car la question du bon usage du complément de loyer n'a pas encore donné lieu à jurisprudence.
Mauvais calibrage
L'encadrement des loyers a mécaniquement stabilisé la hausse des loyers, les barèmes préfectoraux se situant légèrement en dessous des prix du marché. Mais ce dispositif raréfie l'offre de logements, puisqu'il incite les bailleurs à faire de la location saisonnière touristique, beaucoup plus rentable (hors période de crise sanitaire).
Ce dispositif d'encadrement reste par ailleurs mal calibré aux yeux des professionnels de l'immobilier, car il ne reflète pas l'hétérogénéité et la réalité du marché immobilier parisien.
«Par exemple, dans le quartier Clignancourt, dans le XVIIIe arrondissement, le même loyer de référence (27,50 euros par mètre carré pour un 2 pièces d’un immeuble d'avant 1946) est appliqué pour des biens très recherchés sur la place des Abbesses comme pour ceux du boulevard Ney avec vue sur le périphérique», s'étonne Thomas Lefebvre.
Que risque le bailleur ?
Un décret du 13 mai 2019 indique les sanctions encourues par un bailleur ne respectant pas les plafonds. Le préfet donne au propriétaire récalcitrant deux mois pour mettre le bail en conformité et restituer à son locataire les trop-perçus. S'il ne le fait pas dans les deux mois suivant sa mise en demeure par courrier, le préfet peut prononcer à l'encontre du bailleur une amende, pouvant aller jusqu'à 5.000 euros pour les particuliers et 15.000 euros pour les sociétés civiles immobilières.
Pas sûr que ces montants soient dissuasifs, d'autant qu'il faut que le locataire conteste son contrat, ce qui n'est guère dans son intérêt s'il veut garder son logement... Peu de recours sont déposés, du fait de la complexité́ de la procédure.
Les avis de nombreux experts convergent pour estimer que ce n'est pas l'encadrement des loyers qui réglera le problème du déséquilibre de l'offre et de la demande dans la capitale ou à Lille. Celui-ci est lié à un manque de logements disponibles.
Même si cette couche réglementaire supplémentaire peut frustrer ou agacer les propriétaires bailleurs, il leur est toutefois vivement recommandé de respecter la législation et de s'éviter de potentiels problèmes ultérieurs.
July 19, 2020 at 08:13PM
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Immobilier : l'encadrement des loyers n'est pas bien respecté à Paris - Le Revenu
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bien
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